Des portes de la Patagonie à la Terre de Feu


Trouvant qu’il ne faisait pas assez froid à Pucon, nous décidons de descendre vers les terres australes du Chili.

Puerto Varas

Puerto Varas est une ville de taille moyenne située au bord d’un lac, dans la région des… lacs aux portes de la Patagonie chilienne. Notre auberge est une immense maison en bois ressemblant à un chalet de montagne tenue par un français (et pourtant on ne le cherche même pas). La déco est jolie, il y a des poêles à bois dans toutes les pièces et des enceintes diffusent doucement du jazz ou de la musique chilienne. Nous passons deux très agréables soirées près des poêles à bouquiner, regarder un film ou discuter avec les autres pensionnaires. Pierre, le propriétaire qui est aussi guide de montagne, nous indique les deux choses à faire pendant notre court séjour sur place. Une après-midi à Frutillar, une jolie ville au bord du lac Llanquihue et un gros trek à flanc du volcan Osorno qui n’est lui qu’en alerte jaune.

Suivant ses conseils nous partons en bus local pour Frutillar. Nous sommes dimanche et beaucoup de familles se baladent sur la promenade au bord du lac. On voit des dizaines d’optimists dans l’eau, des jeunes jouent au volley sur la plage de sable noir et des enfants remplissent des seaux d’eau. Il ne fait pourtant pas très chaud mais il semble que c’est l’une des premières journées où il fait aussi bon depuis des mois. Les locaux en profitent. Nous allons déjeuner au soleil. Je déguste un très bon kuchen et L-A un gros sandwich. L’influence allemande est omniprésente et il y a des pâtisseries de kuchen ou des “clubs alleman” un peu partout dans la ville ! Nous rentrons à Puerto Varas avec la lumière dorée du soleil qui se couche et qui embellit tout. Le soir, c’est polenta à l’auberge et triage des milliers de photos de la Nouvelle-Zélande.

Nous partageons notre dortoir avec 3 chiliennes qui n’ont pas du tout le même rythme que nous et rentrent vers 3h du matin tandis que nous nous levons vers 6h. Nous sommes trop fatigués pour les entendre rentrer et elles le sont également quand nous partons !

Lever à 6h donc le lendemain pour prendre un bus direction Petrohue et le parc Vicente Pérez Rosales. Cette fois-ci le bus revient sur place à 16h30 et 18h. Nous espérons marcher assez vite pour prendre le premier.

Nous faisons la connaissance de Shane, un retraité australien végétalien qui voyage dans plusieurs pays d’Amérique du Sud. Il nous pose beaucoup de questions sur la France, nous discutons histoire, immigration en France et en Australie, environnement et bien sûr alimentation ! L’échange est très intéressant mais nous qui aimons profiter du calme de la nature, nous trouvons parfois qu’il parle un peu trop, c’est-à-dire non-stop.

Le chemin nous amène à flanc du volcan, nous traversons de très larges tranchées formées par des coulées de lave et nous enfonçons dans la forêt au bord du lac Todos los Santos. La randonnée est longue et il fait très chaud mais les points de vue sont beaux. Un peu moins beaux que la veille mais on apprécie quand même le paysage.

Shane ne mangeant que des légumes, il leade la randonnée et arrive avant nous à l’arrêt de bus après 6 heures de marche intense. Il y est assez tôt pour arrêter le bus de 16h30 qui part et prier le conducteur de nous attendre. Je vous rassure il n’avait que 5 minutes d’avance sur nous !

Puerto Natales

Après 1h de bus depuis Puerto Varas pour Puerto Montt, 2h d’avion depuis Puerto Montt pour Punta Arenas puis 3h de bus depuis Punta Arenas pour Puerto Natales nous arrivons enfin au Singing Lamb, notre auberge dans le sud de la Patagonie. Le trajet entre l’aéroport et la ville nous a donné un premier aperçu prometteur de la région. Nous croisons sur notre chemin des flamands roses, des zorros (renard de Patagonie) et des guanacos avec pour toile de fond une steppe dorée et infinie. La température frôle zéro et un vent à décorner des bœufs souffle en permanence. Bienvenue en Patagonie !

Puerto Natales est exactement comme L-A  se l’imaginait : une petite ville au bord de l’eau avec des maisons en bois, perdue dans la nature, presque au bout du monde. C’est la porte d’accès au parc national Torres del Paine qui est réputé pour ses paysages, ses lacs et ses glaciers. Il faut tout de même faire 2 heures de bus pour y arriver. Notre auberge est géniale, il y a une grande cuisine où l’on se fait un bon plat de polenta le soir même (on adore ça). Nous rencontrons un néo-zélandais très sympa qui travaille dans un potager dans les montagnes et qui déteste les lièvres de Patagonie car ils mangent toutes les cultures !

Comme la météo est “clémente” le lendemain de notre arrivée, nous décidons de ne pas attendre plus longtemps pour faire la grande randonnée qui amène à l’un des emblèmes du parc, les trois torres. Le temps change très vite dans cette région et il vaut mieux ne pas se poser la question deux fois lorsqu’une bonne journée est annoncée. Il est aussi possible de randonner dans le parc pendant plusieurs jours en parcourant les célèbres circuits W et O mais, n’ayant aucun matériel, nous décidons de nous contenter de cette belle randonnée d’une journée sur le circuit W.

Le trek des trois torres dure 8 heures A/R. Lorsque nous arrivons au parc, il est 10h du matin et il ne doit pas faire loin de zéro degré. A cela s’ajoute un vent soufflant à 75km/h. La journée va être longue. En plus il n’y a qu’un seul bus à 19h rentrant à Puerto Natales. Nous avons donc 9h pour effectuer un trek de 8h. Nous n’avons pas le droit à l’erreur (ni à la sieste) ! Diane survole la première partie du trek avec une bonne humeur incroyable. Non content de devoir lutter contre le vent, la neige et la fatigue, je dois aussi lutter contre ma femme… Elle a d’ailleurs refusé d’écrire cette partie de l’article (puis le temps est passé et elle a bien voulu prendre le clavier). Il est vrai que nous ne sommes pas du tout équipés. Le vent devient de plus en fort à mesure que nous avançons et nous devons grimper sur la montagne pendant plusieurs kilomètres sur des chemins complètement enneigés. Bizarrement, nous n’avons pas trop glissé.

Arrivés aux torres, nous faisons 3 photos, tombons plusieurs fois à la renverse plus à cause du vent que de la beauté du paysage (qui n’en reste pas moins époustouflant) et repartons car cela fait un peu plus de 4 heures que nous avons débuté notre marche. Le retour passe beaucoup mieux et bien sûr beaucoup plus vite. La descente de la montagne dans la neige n’est pas simple mais une fois finie nous n’avons plus qu’à nous préoccuper des pumas qui pourraient croiser notre chemin (et du vent aussi bien sûr).

Nous sommes un peu fatigués / exténués lorsque nous atteignons le point de départ du matin. La lutte incessante contre le vent et des rafales parfois supérieures à 80km/h fut plus dure que la randonnée elle-même. Un bus est censé venir nous chercher pour nous amener à un endroit où un autre bus doit nous récupérer pour nous ramener à Puerto Natales. Personne n’est au courant… C’est la panique chez les rangers qui nous accueillent dans leur petite baraque à l’abri du vent. Nous sommes trop crevés pour nous inquiéter et sommes surs que le conducteur de bus nous a confirmé sa venue. Il arrive finalement, en retard, mais ce n’est pas très grave ! Grosse sieste sur le chemin du retour et grosse nuit le soir même. Ce fut une belle et intense journée !

Le jour suivant est un jour off. Pas grand-chose à raconter à part que nous nous baladons dans la ville, au bord de l’eau, allons réserver deux excursions et faisons des courses pour cuisiner des lasagnes. Ce sera notre dîner pour célébrer nos 7 mois de voyage !

Après cette journée de repos, retour au parc Torres del Paine pour aller voir le point de vue de Los Cuernos. Nous débutons la marche avec des guanacos intrigués par notre présence. La randonnée n’est pas longue mais les panoramas sont vraiment beaux bien que le temps ne soit pas idéal. La pluie nous fouette le visage et le vent nous pousse à nous faire presque tomber ! Ça fait partie du jeu et on est bien content d’avoir fait les trois torres le premier jour !

Direction la terre de feu le lendemain pour aller voir des pingouins royaux mesurant environ 1 mètre. Une petite colonie s’est ré installée sur la côte chilienne depuis quelques années et des excursions s’y rendent depuis Puerto Natales. Ayant développé une passion pour ces animaux en Nouvelle-Zélande, nous sautons sur l’occasion et montons dans un van avec un mexicain et deux espagnols pour une journée de voiture. La terre de feu n’est en effet pas si proche que ça. Premier stop vers 8H30 dans une baraque au bord de la route. Certains achètent un café, le mexicain ressort avec deux bières desperados. Le petit-déj national certainement. Il nous faut 5h pour atteindre le détroit de Magellan. Nous n’avions même pas réalisé que nous devions le traverser. C’est moins l’aventure que pour Magellan car on monte dans un ferry, mais c’est quand même un moment important !

Encore 2h de route, un arrêt dans un hôtel au milieu de nul part pour déjeuner et nous arrivons enfin à la réserve. Les pingouins sont bien là ! Et il y a même des bébés pingouins qui ressemblent à de grosses peluches. Il est difficile de se dire que ce sont les mêmes animaux. Nous passons un long moment à les observer. Les petits bougent plus que les grands qui dorment pour la plupart. C’est le cas jusqu’au moment où l’un d’entre eux décide de bouger et nous offre un spectacle bien rigolo. Il se dandine pendant une bonne dizaine de minutes, comme si on lui avait baissé son pantalon et qu’il ne pouvait plus bien avancer (référence Mary Poppins !), pour rejoindre le groupe de petits. Tous se réveillent au fur et à mesure et commence alors une scène magnifique où nous les entendons jaboter et les voyons interagir. C’est l’heure du repas pour les bébés !

 

Le chemin du retour s’annonce long et mouvementé car le vent semble déchaîné et force notre chauffeur à tout le temps redresser la voiture. Nous nous rangeons derrière une longue file de voiture en arrivant près du détroit. Nous patientons un long moment, la nuit tombe et nous apprenons par la radio que la traversée est suspendue pour l’instant car le vent souffle entre 100 et 120 km/h. On attend deux voire trois bonnes heures dans le van secoué par les rafales jusqu’à ce que nous apprenions qu’aucun ferry ne circulera de la nuit. Branle-bas de combat, notre chauffeur nous trouve un logement et nous finissons dans un petit hôtel au milieu de nul part en terre de feu. C’est une grosse déception pour nous car nous devions aller voir le glacier Perito Moreno en Argentine le lendemain. Mais vu tout ce qui nous arrive depuis 7 mois, on s’en remet vite. Ce sera pour un prochain voyage (encore un !).

Le jour suivant la traversée se passe bien. Sur le chemin du retour vers Puerto Natales, notre guide s’arrête plusieurs fois pour nous montrer des villages abandonnés, des autruches (ñandus), des gauchos qui rassemblent leurs troupeaux… C’est une belle journée et le paysage est beau, ça fait passer pilule du Perito Moreno. Et puis on cuisine à nouveau des lasagnes pour dîner, alors ça va.

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